28 Octobre

L’action des associations, le mariage de Bègles, les débats du Congrès, la discussion du Projet, ont permis le débat à propos de l’ouverture du mariage et de l’adoption pour les couples de même sexe.
Le Projet a acté cette double ouverture. T’engages-tu à mettre en oeuvre sans délai ces deux réformes ?

La revendication sur le mariage et l’adoption s’inscrit dans le cadre plus large de la lutte contre les discriminations. L’ouverture du mariage aux couples de même sexe se demande au nom du principe d’égalité, de visibilité et de respect. Quand je parle de République du respect, cela en fait partie. Cette revendication d’égalité des droits est cohérente avec l’émergence de libertés nouvelles. Chacun doit
pouvoir construire sa vie avec dignité, avec des règles claires, qui s’appliquent à tous. En tant que parent, qui peut refuser à un de ses enfants le droit de vivre sa vie si un jour il ou elle lui dit : « Je veux me marier avec une personne du même sexe ? » Il faut donc que la loi le permette, mais sans imposer de norme. Sur ces questions de société il faut rassembler et convaincre : il faut expliquer aux Français que peut-être un jour ils seront confrontés à cette question. Je crois qu’on peut faire franchir ce cap à des personnes pour qui le mariage et l’adoption par des couples de même sexe sont des questions totalement étrangères et bizarres. J’ai la volonté de conduire ces réformes sans blessure, sans déchaîner les passions. C’est très important, car derrière la question du mariage, il y a la question essentielle des discriminations au sein de la République.
Cela signifie que l’homosexualité n’est plus en marge, et que les homosexuels ne sont plus considérés comme des citoyens de seconde zone. Le mariage, l’adoption, mais aussi l’amélioration du PACS, sont dans le projet socialiste. Le débat aura lieu et une majorité de gauche votera un texte les mettant en application.

Comment comptes-tu intégrer l’écologie dans ton action politique pour qu’elle n’apparaisse pas comme
un gadget mais comme une composante essentielle de ton action ?

Je veux engager la France dans la voie de l’excellence environnementale, préparer l’après-pétrole. C’est une question de responsabilité face à une réalité, celle de la crise environnementale profonde que nous vivons, marquée par le changement climatique, la perspective de l’épuisement des hydrocarbures et les atteintes à la santé par les pollutions de toute nature. C’est aussi une question de devoir pour assurer un avenir meilleur à nos enfants. Défendre la justice sociale et l’égalité des chances, cela passe aussi par la prévention et la réparation des risques environnementaux.

Nos concitoyens attendent aujourd’hui de l’Etat qu’il les protège dans un monde instable et perçu comme menaçant. Or, l’Etat peut agir, efficacement s’il le veut, dans la prévention des risques environnementaux et la promotion de nouveaux comportements. Les outils existent, ils ne sont pas utilisés.

Utiliser l’arme de la fiscalité écologique pour modifier les comportements et financer les politiques environnementales, construire de nouveaux réseaux de transports en commun en ville ou en agglomération, diffuser les progrès techniques pour permettre de consommer moins, lancer un grand plan de recherche publique pour mettre au point de nouvelles énergies alternatives, lancer un programme pour une meilleure isolation des logements, voilà les orientations pour s’engager dans la voie de l’efficacité énergétique.

Je crois en notre capacité à réformer nos politiques publiques pour mettre concrètement en oeuvre les conditions de l’excellence gouvernementale. Je crois également dans la capacité de la France, une fois qu’elle se sera, à son tour, engagée dans cette voie, à entraîner avec elle ses partenaires européens.

J’habite dans un quartier difficile dans la périphérie de Strasbourg. Je vois mon quartier se dégrader au jour le jour, à cause de certains parents trop laxistes avec leurs enfants. Que comptes-tu faire pour responsabiliser ces parents ?

Etre parent c’est difficile, exigeant, essentiel. Nous devons aider ceux qui n’arrivent plus à assumer leurs responsabilités, parce qu’ils se sentent euxmêmes désorientés dans une société marquée par le chômage et la précarité. Des parents qui décrochent vivent une souffrance qu’il faut aider à surmonter.

La droite n’a de cesse de stigmatiser ces familles et ne fait rien pour les aider. Lorsqu’elle supprime les subventions aux associations qui se battent dans les quartiers en difficulté, elle prive ces familles des moyens de reprendre en main leur destin et de transmettre à leurs enfants les valeurs et le bagage qui leur seront indispensables pour réussir leur vie.

Tout se tient : les familles, l’école, l’emploi. Tirer le pays vers le haut, c’est restaurer la confiance, créer des emplois, remplir la promesse républicaine d’égalité scolaire, donner des repères aux familles déboussolées.

S’agissant des personnes en situation de handicap, je souhaiterais connaître ton opinion sur la loi de février facilitant la scolarisation des élèves concernés dans des établissements ordinaires, et plus généralement la politique que tu entends mener sur le handicap.

Ministre de l’enseignement scolaire, j’ai mis en place le dispositif « Handiscol », toujours en vigueur. La situation était insupportable : de nombreux parents se voyaient refuser le droit fondamental à la scolarité obligatoire. Ils étaient ballottés d’écoles en institutions spécialisées… A la difficulté d’élever un enfant handicapé s’ajoutait l’indifférence d’un système qui refusait de leur ouvrir ses portes. L’idée, nouvelle à l’époque, était que les enfants handicapés, si leur handicap le leur permettait, puissent être intégrés dans le système scolaire ordinaire. C’est un droit élémentaire pour les enfants handicapés et c’est aussi une chance pour tous les autres enfants de faire l’apprentissage, dès le plus jeune âge, du « vivre ensemble », quelles que soient les différences. C’est cela l’égalité des chances et des droits, la lutte contre les discriminations. Mais pour y parvenir, il faut des moyens matériels et humains. Aujourd’hui, ils font défaut. La loi de est restée une loi d’affichage et d’annonces. Il faudra reprendre cette politique d’intégration scolaire en y consacrant les moyens nécessaires, en équipant plus d’établissements scolaires pour l’accueil de ces enfants, en créant des postes d’auxiliaires de vie scolaire.

Plus généralement, notre société doit donner toute leur place aux personnes handicapées, comme beaucoup de pays du nord de l’Europe ont su le faire. C’est bien sûr une affaire de règles et de moyens, pour assurer l’accessibilité, le droit au travail et à la formation professionnelle, des aides de vie. Mais c’est aussi une question d’état d’esprit : la première exclusion est dans le regard que nous portons sur les personnes handicapées.

En matière d’éducation, le gouvernement Villepin a décidé de s’attaquer à la question du temps de travail des enseignants : quelles mesures envisages-tu en la matière ? Que faut-il changer d’autre dans les conditions de travail des enseignants ?

Enseigner est un métier difficile : transmettre les savoirs, stimuler l’ouverture intellectuelle et l’esprit critique, établir à la fois des rapports d’autorité et de confiance, affronter dans certains établissements la violence sociale. Les enseignants méritent notre respect et notre soutien. Je n’accepterai jamais l’approche de la droite qui fait des enseignants, voire des fonctionnaires en général, les boucs émissaires du malêtre social.

Notre pays a besoin d’un système éducatif efficace, d’où les enfants sortent avec une formation, et d’une école où l’on puisse enseigner dans le calme et le respect mutuel. Je ne pense pas que le temps de travail des enseignants constitue le point de départ de la réflexion sur l’école. D’abord parce que la répartition de ce temps (présence devant les élèves, préparation, correction de copies…) est extrêmement variable en fonction des niveaux d’enseignement.

Ensuite, parce que l’approche par le temps de travail ne règle aucun des vrais problèmes. C’est par les conditions de travail des enseignants et des élèves qu’il faut commencer, pour retrouver l’envie d’enseigner et l’envie d’apprendre. Il faudra, comme je l’ai dit à plusieurs reprises, renforcer la présence adulte dans les établissements et, si nécessaire dans certaines classes, veiller à la constitution d’équipes pédagogiques soudées. Il faudra surtout rétablir les crédits pédagogiques que les budgets de la droite n’ont cessé de rogner : il ne sert à rien d’enjoindre aux enseignants de mettre en place des projets pédagogiques nouveaux si on ne leur en donne pas les moyens financiers. Le projet socialiste propose une série de mesures pour atteindre ce qui est à mes yeux l’objectif n°1 : remettre l’éducation au coeur du changement que nous voulons pour la France.

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