Chères amies, chers amis,
Depuis ce matin, pour faire oublier le scandale de la visite de Kadhafi, s’est déclenché un tintamarre avec des annonces de 10 milliards d’euros de contrats : info
ou intox ?
Qu’ils soient réels ou pas, rien ne justifie cette visite. Mais il ne faut pas que les français soient, en plus, abusés par la réalité de ces intérêts
économiques.
Pourquoi y-a-t-il si peu de transparence, pourquoi si peu de vérification ? Qu’y-a-il de réel dans les 10 milliards de contrats annoncés bruyamment pour étouffer le
débat sur les droits de l’homme ?
1. S’agit-il de contrats signés ou de déclarations d’intention ?
2. Quel est le contenu réel de ces contrats ?
3. Combien de délocalisations sont induites par ces contrats ?
4. Quelles sont les garanties en termes de développement d’emploi en France ?
5. La dangerosité de la dissémination du nucléaire a-t-elle été examinée ?
6. Pourquoi n’y a-t-il eu aucun débat à l’assemblée et aucune transparence ?
S’humilier devant Kadhafi, cautionner l’usage du terrorisme, du système de tortures et de disparitions n’est pas digne de la France.
Après les félicitations « chaleureuses » à Vladimir Poutine qui a organisé des élections en muselant toutes les oppositions, voici la réception, en grandes pompes et
en satisfaisant les extravagances de l’intéressé, du dictateur libyen, le colonel Kadhafi. La France accueille un chef d’Etat qui non seulement a laissé emprisonner et torturer les infirmières
bulgares et le médecin palestinien sous la fausse accusation d’avoir inoculé le sida à des enfants, mais qui a financé, pendant des années, le terrorisme international. Personne n’a oublié que
les responsabilités des services secrets libyens ont été reconnues par la justice internationale dans l’attentat de Lockerbie en 1988 mais aussi dans celui du DC10 d’UTA en 1989 qui a tué de
nombreux Français. C’était aussi le régime libyen qui avait organisé un attentat à Orly en 1983. Quant au peuple libyen, il est la première victime du régime : il n’y a jamais eu d’élections, le
colonel Kadhafi est désigné comme dirigeant à vie, et ses opposants n’ont de choix qu’entre la mort et l’exil.
Nicolas Sarkozy, qui annonçait, durant la campagne électorale, une rupture avec la politique étrangère de son prédécesseur (« il vaut mieux serrer la main de Bush
que celle de Poutine » avait-il déclaré), en accentue les pires traits jusqu’à la caricature et donne de la France une image à la fois détestable et ridicule. Même si chacun peut s’accorder sur
le fait qu’une politique étrangère doit prendre en compte la défense de nos intérêts économiques, et que le monde instable et dangereux dans lequel nous vivons demande que nos dirigeants puissent
parler aussi à des personnalités peu respectueuses de la démocratie, il y a des lignes rouges qu’il faut savoir ne pas franchir.
N. Sarkozy nous dit qu’il reçoit le chef d’état libyen parce que celui-ci a renoncé à fabriquer des armes de destruction massive et s’est engagé à lutter contre le
terrorisme. Outre que le colonel Kadhafi lui a apporté un cruel démenti en défendant le principe du terrorisme avant de venir à Paris, on constate que seule la France accueille Kadhafi avec de
tels honneurs. S’il s’agit de « récompenser » celui-ci d’être revenu à un semblant de respect de la légalité internationale, c’est déjà fait, avec la levée des sanctions qui avaient été
prononcées contre la Libye après les deux attentats.
Quant aux fabuleux contrats annoncés par le gouvernement, il faudra en mesurer la réalité. Les entreprises britanniques et italiennes sont mieux placées en Libye que
les sociétés françaises. Pourtant, le colonel Kadhafi n’a pas été reçu à Londres ou à Rome. En outre, on peut craindre que ces contrats, outre une hypothétique centrale nucléaire civile, ne
portent sur des armements destinés à garantir la survie de la dictature. Personne ne menace la Libye qui n’a donc pas besoin de se défendre contre un agresseur extérieur. En revanche, des
hélicoptères servent à mitrailler une foule de manifestants ou à surveiller des déplacements. On peut redouter aussi les risques de revente de toute cette panoplie d’armements à toutes les
rébellions de la région en fonction des intérêts du régime libyen. Est-ce de cela dont l’Afrique a besoin ?
Le commerce extérieur français, structurellement déficitaire depuis des années, a lui aussi besoin d’autres mesures : stimulation de l’innovation pour une meilleure
insertion dans la compétition internationale, aides adaptées aux PME qui exportent et créent des emplois…
N. Sarkozy est, quant à lui, dans une politique de « coups », qui isole la France de ses partenaires européens. C’est une politique étrangère dénuée de toute morale
et de toute cohérence. On est dans le spectacle, un triste spectacle.
Le débat est ouvert.
Amicalement,
par Thomas
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