Ségolène Royal (PS) a dénoncé à Paris une
"connivence" entre les puissants et "ceux qui jonglent avec les milliards", à propos de ce qu'elle a qualifié d'"invraisemblable scandale de la Société Générale (Paris: FR0000130809 - actualité)
".
L'ex-candidate à la présidentielle s'exprimait à la Bellevilloise, salle de spectacles du XXème arrondissement, devant quelque 300 militants de son association Désirs d'avenir, qui revendique 2.200
militants à Paris et 15.000 en France et est présidée par l'avocat Jean-Pierre Mignard.
Selon Dominique Bertinotti, maire du IVème arrondissement, proche de Mme Royal, c'était la première fois qu'elle s'exprimait ainsi publiquement devant une assemblée de Désirs d'avenir.
La présidente de Charentes-Poitou a pointé "cette espèce de connivence, en haut, des puissants et de ceux qui jonglent avec les milliards pendant qu'à la base les petits ont du mal à vivre, à
survivre".
"Il faut un rétablissement moral à partir de ce scandale, au moins que la leçon en soit tirée et que les banques, grâce à une loi bien claire, cessent de se faire du beurre sur le dos des plus
modestes", a poursuivi Mme Royal. "Faisons très rapidement la réforme que je réclamais depuis longtemps: rémunérer les comptes de petits épargnants".
Evoquant les municipales, elle a affirmé: "c'est dans les collectivités territoriales que nous allons pouvoir faire un rempart contre la politique de la droite, celle qui met les valeurs
financières au-dessus de toute valeur humaine".
"Cette invraisemblable scandale nous montre à quel point le capitalisme est devenu incompétent, irresponsable, intolérable, désinvolte", a lancé l'ex-candidate.
Avant de s'envoler pour Florence, où se tenait une réunion du nouveau parti démocrate (centre gauche), Mme Royal a été ovationnée par ses partisans, réunis sur le thème de la Ville, avant de futurs
débats sur le développement durable puis la démocratie participative.
"Les 35 heures correspondent à un vrai besoin humain", a estimé Ségolène Royal, dénonçant "la provocation et l'improvisation" dont a fait preuve Nicolas
Sarkozy en reconnaissant vouloir mettre fin aux 35 heures lors de sa conférence de presse à l'Elysée.
"S'il n'y a plus de durée légale du travail, à ce moment-là comment va-t-on mesurer les heures supplémentaires?". Elle a dénoncé une mesure "inapplicable" et "un
coup porté aux salariés", provoquant "une grande déception, une grande colère" dans le pays. "Pourquoi brutaliser à la fois les salariés pour qui les 35 heures correspondent à un vrai besoin
humain, celui de se reposer, de s'occuper de sa famille, et les entreprises qui ont eu beaucoup de mal à les mettre en place, qui aujourd'hui sont à peu près stables?". "A force de vivre comme un
milliardaire et de se déplacer dans les jets privés de ses amis", Nicolas Sarkozy "ne se rend plus compte de la situation actuelle de la France, de l'angoisse des Français, de leurs inquiétudes,
de leurs désillusions aussi". "Je pense qu'il faut qu'il redescende sur terre."
Vous envisagez désormais de
prendre les rênes du PS, mais ne vous en êtes-vous pas tenue trop éloignée depuis l'élection présidentielle ?
Ségolène Royal. Je ne le crois pas. J'ai profité de ces quelques mois pour lire, écrire le bilan auquel je m'étais engagée*, travailler sur le fond
et accepter des invitations politiques à l'étranger. Et à chaque fois avec des élus et des responsables socialistes ! Et consacrer du temps à mes enfants et à mes amis. Cette respiration était
nécessaire. Du coup, cela a créé une interrogation sur mes projets. Certains m'ont crue anéantie. Eh bien non ! J'ai beaucoup réfléchi, beaucoup consulté, et j'ai entendu tous ceux qui me
demandaient si j'allais les laisser tomber. Je pense notamment aux jeunes des quartiers, mais pas seulement, qui attendent tellement que la politique change, et à d'autres qui ont cru à certains
slogans et qui aujourd'hui se sentent trahis et nargués.
Vous pensez que les courants, dans l'opinion comme au PS, vous sont encore porteurs ?
Dans de multiples signes quotidiens, je peux vous dire que le lien avec les Français est resté intact. A chaque fois, j'en éprouve la même émotion. Tant de
gentillesse, de générosité, d'attente ! Les millions de voix qui se sont portées sur mon nom au second tour de la présidentielle me donnent surtout des devoirs et une incontestable expérience.
Personne ne peut contester qu'il y a un potentiel à mettre au service du PS et de la préparation de l'alternative. Je suis très heureuse de voir que beaucoup des idées que j'ai portées durant la
campagne sont aujourd'hui largement reprises, notamment dans le cadre des forums du PS. Nicolas Sarkozy continue de piller les propositions qu'il combattait il y a encore six mois, je pense à la
réforme de l'indice des prix. Il vient même de reconnaître qu'on ne peut réformer un pays sans dialogue social, quelle découverte ! Mais que de temps perdu et de dégâts en sept mois ! Il a aussi
dérobé à Edgar Morin le concept de « politique de civilisation », alors que sa méthode est aux antipodes de cette humanisation des politiques publiques.
Certains vous reprochent de lancer une offensive pour prendre le contrôle du parti alors que démarre la campagne des municipales...
Je m'intéresse à l'avenir du PS, je travaille et j'irai jusqu'au bout de ce travail en équipe. Ne nous trompons pas. Ce sont les polémiques entre socialistes qui
nuiraient à la dynamique de la campagne municipale. Et je mets en garde ceux qui s'amuseraient, une fois de plus, à se tirer une balle dans le pied. Car, voyez-vous, c'est le mouvement qui fera
gagner des mairies supplémentaires. J'ai fait bouger les lignes durant la campagne. Le travail politique doit d'abord se faire sur les idées. La question du leadership et de ma responsabilité se
posera à ce moment-là, et à ce moment-là seulement.
Ecartez-vous l'hypothèse de vous rallier à un premier secrétaire autre que vous-même ?
La question n'est pas d'actualité. Cela ne vous empêche pas de pousser les feux du débat interne... Tant mieux s'il y a du débat ! Pour moi, la politique, c'est
faire mouvement d'entraîner, de donner envie.
Quand souhaitez-vous que le congrès ait lieu ?
Ce qui compte, c'est le contenu. Et il faut que les socialistes soient fraternels les uns avec les autres quelle que soit la densité des débats, qui doivent être
utiles à la France.
Quel est votre programme immédiat ?
Retravailler avec tous les socialistes, y compris ceux qui hier n'ont pas été à mes côtés, pour rassembler, réunir, consulter, discuter, proposer. Stimuler les
forums participatifs dans le cadre des municipales. M'impliquer pleinement aux côtés des candidats aux municipales et cantonales qui me le demandent. Poursuivre le travail de réflexion en
profondeur pour le mettre demain au service des Français, pour le traduire en action et en résultat. Et participer, le 20 janvier, au forum sur la rénovation du PS qui se tiendra à la Mutualité,
à Paris.
Propos recueillis par Philippe Martinat - Le Parisien
* « Ma plus belle histoire c'est vous », Editions Grasset.
Hier, Ségolène Royal est venue apporter son soutien à José Bové. L'altermondialiste a entamé une grève de la faim pour obtenir l'activation par le gouvernement de
la clause de sauvegarde à Bruxelles, qui permettrait d'interdire la culture du maïs OGM en France. « Je respecte et je salue ce courage politique », a lancé Ségolène Royal à Bové, installé dans un
bâtiment occupé par l'association Droit au logement avec une quinzaine d'autres militants, rue de la Banque (Paris II e ). Elle a également salué « sa posture morale ».
Ce soir j'ai d'abord une pensée particulière pour ceux qui souffrent, qui sont dans la solitude, dans l'abandon, ou qui ont connu au cours de l'année , des drames ou des épreuves.
Je vous souhaite que l'année vous apporte de l'espoir et un nouveau départ dans la vie, et j'en suis sûre, cela va vous arriver.
Je souhaite à la France, c'est à dire à nous tous, une République plus fraternelle ou chacun et chacune aura le sentiment, et même la certitude, qu'il doit pouvoir avancer, réussir, en
comptant sur les autres, et d'abord en comptant sur l'Etat.
Et d'abord, l'Etat doit tenir sa parole et ceux qui ont parlé en son nom doivent faire ce qu'ils ont dit. J'attends par conséquent que l'année apporte aux bas salaires une hausse
conséquente, une revalorisation des petites retraites car je sais beaucoup de personnes âgées dans la difficulté, après avoir travaillé pourtant toute leur vie.
Je veux que l'année soit comme cela a été promis, l'année de lutte contre la vie chère. Et je souhaite pour la France, c'est à dire pour nous tous, que les garanties fondamentales
soient renforcées et non pas fragilisées. Pouvoir se soigner, se loger, faire réussir ses enfants à l'école. Recevoir un juste salaire de son travail, pouvoir préparer l'avenir, pouvoir
accéder aussi à la culture, tout cela la France a les moyens de pouvoir l'apporter à chacun et à chacune.
Un État fort doit aussi garantir une égalité de développement sur l'ensemble du territoire national et dans les Outre mers. Chacun a le droit d'accéder à la liberté de choix de sa vie, et
en même temps aux conditions qui vont garantir cette liberté.
Le monde est devenu un village, rien de ce qui se passe à l'autre bout de la planète nous est étranger. Chaque événement a maintenant une incidence sur toutes les parties du globe. C'est
pourquoi si nous voulons ensemble maîtriser les fanatismes, les terrorismes, les atteintes insupportables à l'environnement, alors nous devons faire converger nos politiques diplomatiques
pour que les valeurs de protection de la personne humaine l'emportent partout et toujours sur les valeurs financières ou sur l'obscurantisme. C'est cela aussi que je souhaite.
Le temps presse, la France mérite beaucoup mieux que cette juxtaposition entre des comportements ostentatoires et d'un luxe insolent d'un coté, et tant de précarité ou de fragilité pour le
plus grand nombre de l'autre.
La France mérite mieux oui, parce que nous avons du potentiel, de l'énergie, du talent dans nos laboratoires, nos entreprises, nos écoles. Toute cette énergie là, pendant l'année , doit
être mise au service d'une croissance enfin retrouvée.
Le temps presse, le potentiel est là, et c'est pourquoi je souhaite que l'année soit l'année de la morale des comportements et des résultats.
Ségolène Royal a déploré
à Romans, où elle venait de dialoguer avec des ouvriers de l'usine Charles Jourdan mise en liquidation judiciaire, que "le président s'amuse" alors que "la France souffre".
"Le président s'amuse, et pendant ce temps, la France souffre", a déclaré l'ex-candidate PS à la présidentielle.
"Le peuple souffre et le roi s'amuse".
Ségolène Royal venait de s'entretenir longuement avec des ouvriers de cette usine de chaussures de luxe (197 en tout, sous le coup de licenciements).
"Il faut que les choses sérieuses commencent et que la politique industrielle se mette en place. Il est plus que temps de passer à l'action". Elle a voulu faire de
sa visite "un geste de solidarité pour dire +en voilà assez de cette cruauté sociale, de ces entreprises qui ferment et qui délocalisent+".
"Je ne veux pas qu'une chappe de plomb s'abatte sur ce qui se passe aujourd'hui".