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26 mars
par Thomas publié dans : Ségolène
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20 mars

par Thomas publié dans : Ségolène
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20 mars
Ségolène Royal veut faire disparaître les situations d'inégalités dans lesquelles se trouvent les homosexuels. La candidate socialiste précise, en exclusivité pour "Têtu", son programme en direction des homos.

Depuis notre rencontre en juin dernier, où vous aviez pris position sans nuance pour l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples de même sexe (lire Têtu n° 113), vous avez été investie par les militants socialistes. À l'occasion des débats participatifs que vous avez menés depuis novembre, avez-vous été interrogée par des homosexuels ? Sur quels sujets portaient leurs interrogations ?

Bien sûr ! Je n'ai naturellement pas participé aux 6 000 débats qui se sont tenus dans toute la France mais les homosexuels s'y sont exprimés, comme tous les citoyens qui l'ont souhaité, pour faire part de leur vécu, de leurs propositions et de leurs attentes. Je sais aussi que des «Cafés Ségolène» ont été organisés par l'association Homosexualités et socialisme. À la lecture des comptes-rendus de tous ces échanges, j'ai perçu dans les interrogations une forte demande en faveur d'une société qui ne les rejette plus, que ce soit au sein de leur famille, au travail ou à l'école. Une société qui leur assure respect et protection contre les violences homophobes ou les traitements discriminatoires, certes, mais aussi tout simplement contre les comportements insultants, de rejet ou d'incompréhension. Sur les 135 000 contributions postées sur mon site Internet Désirs d'avenir, les homosexuels ont activement participé au forum «Construire sa vie» en appelant à la reconnaissance de leur droit à mener une vie d'adolescent, d'élève ou d'étudiant, une vie professionnelle, conjugale ou familiale qui soit une vie «comme celle des autres».

Dans votre programme présenté à Villepinte le 11 février dernier, vous défendez dans votre plan de lutte contre les discriminations «l'égalité de droits pour les couples de même sexe». Est-ce volontaire de ne pas citer explicitement le mariage et l'adoption pour les couples homosexuels ou s'agit-il, pour vous, de défendre un programme plus large ?

Mais «l'égalité de droits pour les couples de même sexe» comporte évidemment le mariage et l'adoption ! Cette notion est cependant plus large, puisqu'elle concerne aussi toutes les réformes qui porteront sur le couple et, plus largement, sur les droits familiaux, sociaux, fiscaux, successoraux, etc. Je me suis, ainsi, déjà prononcée pour qu'à l'occasion de la réévaluation prochaine de la loi de bioéthique, la demande formulée par les couples de femmes d'accéder à l'assistance médicale à la procréation soit examinée avec attention.

Certains candidats à l'élection présidentielle s'opposent à l'ouverture du mariage et défendent la création d'un nouveau contrat, séparé du Pacs, qui serait une union civile. Que pensez-vous d'une telle proposition ?

Je suis opposée à une telle proposition qui, parce qu'elle serait «réservée» à une catégorie de la population, me semble imprégnée d'une logique communautariste et discriminatoire. Le Pacs, voté par la gauche et dont, au demeurant, le succès ne se dément pas – plus de 500 000 Français ont conclu un Pacs depuis 1999 –, avait déjà rejeté cette logique en offrant une nouvelle forme de conjugalité ouverte à tous. Son succès confirme la justesse de cette approche.

Vous avez annoncé que si vous étiez élue, la première loi présentée au Parlement serait relative aux violences faites aux femmes. La réforme du mariage et de l'adoption pourrait-elle faire partie des priorités du début de votre quinquennat ?

Je me suis engagée à faire voter une loi contre les violences faites aux femmes dès mon élection, si les Français me font confiance, car il y a véritablement urgence. J'ai bien conscience du fort effet symbolique qu'aura le vote d'une loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples de même sexe. Je sais aussi à quel point cette loi est attendue par tous les parents qui, aujourd'hui, souffrent de ne pouvoir faire reconnaître leur lien avec les enfants qu'ils aiment et élèvent, parfois depuis de nombreuses années. Ils l'attendent avec d'autant plus d'espoir qu'ils ont vu, en raison de la jurisprudence récente de la Cour de cassation, se fermer à eux la porte de l'adoption simple. Le vote de cette loi est important aussi, car il consacrera l'égalité entre enfants, quelle que soit leur configuration familiale. Il interviendra donc rapidement. Il marquera enfin le terme d'une trop longue exclusion des homosexuels. J'en comprends bien l'urgence, mais il ne faut pas pour autant négliger la négociation de ce virage essentiel : il faudra prendre le temps de l'explication aux Français. Il ne sera pas long mais il sera décisif pour que le vote de la loi s'accompagne véritablement d'une large prise de conscience par tous de la nécessaire fin des discriminations.

Passons à une question grave, déjà évoquée avec les candidats en 2002 : le taux élevé de suicide chez les jeunes gays et lesbiennes. Quelles mesures proposez-vous pour lutter contre ce phénomène ?

Mettre fin à la stigmatisation dont sont victimes les homosexuels suppose des lois, bien sûr, s'appuyant sur les principes d'égalité et les valeurs de respect, qui les affirment haut et fort : des lois positives accordant de nouveaux droits et de nouveaux devoirs et des lois répressives envers l'homophobie.

Mais cela est insuffisant : l'impératif est de faire de la lutte contre les discriminations, auxquelles les jeunes sont extrêmement sensibles et qui peuvent les conduire au suicide ou à des comportements à risques – et de la fin de ces discriminations –, un enjeu éducatif. C'est ce que j'ai commencé à faire en qualité de ministre de l'Enseignement scolaire lorsque j'ai inscrit la question de la lutte contre l'homophobie dans les instructions officielles. Ces actions devront être reprises avec détermination en mobilisant l'ensemble des acteurs de la communauté éducative : direction des établissements, enseignants, personnels et, bien sûr, élèves et parents, à travers leurs associations. Les adolescents découvrant ou s'interrogeant sur leur orientation sexuelle doivent, au plus tôt, pouvoir être accompagnés et soutenus en cas de besoin afin de ne pas se trouver confrontés, dans la solitude, au rejet de leur famille ou de leur entourage. Dans le Pacte présidentiel que je propose aux Français, deux engagements vont en ce sens : l'intégration au cursus scolaire d'un programme d'éducation au respect de l'autre ainsi que le renforcement de la présence d'adultes dans les établissements, avec la dotation d'un poste d'infirmière et d'assistante sociale à temps plein. Enfin, le développement de la médiation familiale, à laquelle je crois beaucoup, sera de nature à faciliter l'apaisement des conflits, une meilleure compréhension et un retour du dialogue entre parents et adolescents.

Comment réformer le droit d'asile afin que les homosexuels persécutés dans leur pays d'origine puissent voir leur situation reconnue en France par l'Ofpra ?

Le droit d'asile ne doit pas être discriminatoire; en conséquence, il doit s'appliquer pleinement aux personnes persécutées dans leur pays d'origine en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre et ce, en tenant compte non seulement des persécutions officielles telle que la criminalisation de l'homosexualité mais également, lorsqu'elles sont avérées, des persécutions de fait.

Selon vous, quel rôle doit jouer la France sur un plan international contre la pénalisation de l'homosexualité ? Avez-vous signé la pétition lancée par le comité Idaho à ce sujet ou comptez-vous le faire ?

J'ai bien sûr signé la pétition du comité Idaho qui fait un travail considérable en faveur de la reconnaissance de la Journée mondiale contre l'homophobie et de la dépénalisation de l'homosexualité. Je veux l'en saluer ici. La France quant à elle doit retrouver son rôle moteur sur la scène internationale et renouer avec sa vocation en matière de défense des droits humains. Si les Français me font confiance, elle agira dans toutes les instances où elle est présente pour promouvoir l'universalité de sa conception de l'égalité : égalité entre les peuples, égalité entre hommes et femmes et égalité des sexualités. Ce combat passe par la condamnation ferme et explicite de la pénalisation de l'homosexualité partout où elle existe. Un soutien sera également apporté aux initiatives internationales en faveur d'une reconnaissance formelle de l'égalité des droits des homosexuels. Je pense, par exemple, à la déclaration historique présentée, en décembre, devant le Conseil des droits de l'homme de l'ONU par le représentant de la Norvège, qui condamne les violations des droits de l'homme commises en raison de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre.

Plus d'un séropositif sur cinq déclare avoir des difficultés financières et au moins 35 % des séropositifs touchent une allocation adulte handicapé (AAH). Vous avez annoncé, dans votre pacte présidentiel, une revalorisation immédiate de 5 % de l'AAH (environ 610 euros pour une personne seule). Est-ce suffisant pour lutter efficacement contre la précarité des personnes handicapées ?

S'agissant de l'allocation adulte handicapé, j'ai également proposé, en plus de son immédiate revalorisation de 5 %, une adaptation de ses conditions d'attribution aux maladies évolutives à diagnostic incertain. Il convient, en effet, que soit mieux prise en compte la réalité de la situation des personnes atteintes et, notamment, le processus d'insertion professionnelle dans lequel elles peuvent avoir la volonté, la capacité ou l'opportunité de s'engager. Il est évident que le montant de cette allocation devra ensuite bénéficier d'une revalorisation progressive la rapprochant du Smic. Mais pour lutter contre la précarité des personnes en situation de handicap, d'autres mesures s'imposent dans le cadre d'une politique globale : un dispositif visant à faciliter une insertion professionnelle qui soit compatible avec les contraintes liées à l'état de santé, une offre de logement adaptée à la situation financière des malades, une offre de soins de qualité non-discriminatoire, en particulier à l'égard des étrangers.
par Thomas publié dans : Ségolène
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20 mars
Ségolène Royal a détaillé le contenu des réformes institutionnelles qu'elle souhaite adopter pour permettre le passage à une VIe République dès l'automne prochain.

Au lendemain de son discours de la porte de Versailles, la candidate socialiste s'est elle-même chargée de l'explication de texte lors d'une rencontre informelle avec la presse devant qui elle a évoqué la convocation d'une assemblée constituante.

Persuadée que le système est "à bout de souffle", la présidente de Poitou-Charentes souhaite créer un "nouvel équilibre des pouvoirs pour moderniser la France, rendre plus efficaces la décision politique".

"J'irai le plus loin possible dans ce qui pourra permettre de réformer en profondeur le fonctionnement des institutions", a-t-elle précisé, parlant d'un "paquet global" de réformes et de textes destinés à améliorer les démocraties parlementaire, sociale, participative et territoriale.

Faudra-t-il pour cela convoquer une assemblée constituante? "Je souhaite aller jusque là", a-t-elle confié devant les journalistes, inhabituellement conviés à son QG de campagne pour un "échange informel et convivial" à moins de cinq semaines du premier tour.

En cas de victoire le 6 mai, date du deuxième tour de la présidentielle, Ségolène Royal pourrait annoncer aux électeurs que l'Assemblée nationale issue des prochaines législatives, en juin, sera déclarée constituante. Le dernier cas remonte aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale.

Un référendum institutionnel se tiendrait ensuite à l'automne pour valider l'ensemble de ces propositions. Il porterait notamment sur le mandat unique de parlementaire, qui s'appliquerait dès les municipales de . Le rôle du Parlement en matière sociale, d'environnement, de politique étrangère et de défense serait renforcé.

Le "pacte présidentiel" précise également qu'une "dose de proportionnelle" sera introduite pour les législatives, que le 49-3 sera supprimée et que le mode d'élection du Sénat sera modifié.

Le droit de vote des étrangers aux élections locales - promesse électorale de la gauche depuis 1981 - fera également partie des projets soumis au vote des Français.

En revanche, la candidate socialiste n'a pas souhaité préciser ses idées sur la répartition des tâches entre présidente et Premier ministre.

UNE PRESIDENTE A L'ASSEMBLEE?

Tout sauf "improvisée", cette annonce d'une "VIe République" marque "l'aboutissement" de sa réflexion sur "l'ensemble des volets" institutionnels, a-t-elle assuré.

Reprendre le vocable "VIe République" à son compte, et non l'idiome "République nouvelle" comme le stipule son "pacte présidentiel", c'est également un moyen de "continuer sur (s)a liberté de parole" par rapport au Parti socialiste, dont les courants internes se sont opposés sur la VIe République lors du congrès du Mans.

"Je ne suis pas prisonnière de tel ou tel vocabulaire", a expliqué Ségolène Royal, qui revendique le droit d'utiliser toutes les "idées qui me semblent le plus conformes" pour réformer le pays.

Dans la dernière ligne droite, elle revendique de plus en plus sa liberté, se plaçant à la fois dans la posture gaullienne de la rencontre entre un homme, ou une femme, et d'un peuple, et dans le sillage de François Mitterrand, qui se voulait au-dessus des partis.

Une liberté qu'elle entend conserver une fois à l'Elysée au nom de l'efficacité démocratique. "Le principal risque du pouvoir, c'est l'isolement", a-t-elle avancé, exprimant le souhait de "rester au contact" des Français, de promener ses "petites antennes" dans les territoires.

Pas question d'accepter "36 filtres pour acheminer vers moi des vérités partielles", a souligné la première femme à avoir une chance réelle d'accéder à la magistrature suprême.

Tout en veillant à ne pas "désolenniser le rôle du chef de l'Etat", la présidente Royal se rendra "peut-être une fois par semaine" sur le terrain. Adepte de la démocratie participative, elle rendra compte de son mandat une fois par an sous une forme qui reste "à travailler" mais qui pourrait être un "jury de citoyens tiré au sort".

Elle "imagine très bien" également se rendre à l'Assemblée nationale pour "répondre pendant une heure aux questions non préparées des parlementaires"... une possibilité qu'interdit la Ve République.

Reuters
Ségolène Royal : discours aux élus républicains - kewego

par Thomas publié dans : Ségolène
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16 mars

 

 

par Thomas publié dans : Ségolène
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15 mars
Face à la montée de François Bayrou dans les sondages, deux lignes s'affrontent au PS. Certains vous conseillent d'être plus à gauche, d'autres vous demandent d'assumer le virage social-démocrate. Quelle est votre position ?

La ligne, c'est moi qui la trace. Je suis moi-même, je regarde la réalité de la France telle qu'elle est, je propose des solutions efficaces en expérimentant ce qui mérite de l'être, sans être prisonnière d'aucun dogme. Mais c'est une révolution difficile à accomplir : il faut que les Français acceptent de projeter sur une femme l'exercice du pouvoir.

Si vous êtes élue, ferez-vous le changement en cent jours ou en cinq ans ?

La profondeur de la crise appelle une révolution. Dès l'automne, il y aura un référendum sur les institutions pour instiller une dose de proportionnelle, renforcer les pouvoirs du Parlement, favoriser la démocratie participative, à travers les jurys citoyens, et développer une action politique qui rende compte au jour le jour et qui soit capable de s'affranchir des lobbies. Et immédiatement, je prendrai des mesures pour débloquer l'économie.

Toucherez-vous à l'équilibre des pouvoirs locaux ?

Je ne pense pas qu'on puisse supprimer un échelon, cela mettrait plus de perturbation que d'ordre. En revanche, il faut répartir de façon claire les responsabilités entre les différentes collectivités. C'est ainsi que l'on pourra éviter les doublons. Pour faire cette réforme, il faudra supprimer le pouvoir de veto du Sénat sur les questions institutionnelles.

Quelle sera votre première action économique ?

L'emploi des jeunes. Ce qui ronge le plus la société française, c'est la difficulté qu'éprouvent les jeunes qualifiés à s'insérer sur le marché du travail. Je veux m'inspirer de ce qu'a fait Tony Blair lors de son premier mandat. Il a appelé les entreprises à se mobiliser fortement et il a réussi en très peu de temps à obtenir des résultats

Les emplois-jeunes, cela rappelle ce qu'avait fait Lionel Jospin en 1997...

Les emplois-jeunes n'étaient pas destinés au secteur privé, sauf les associations. Les emplois-tremplins ont aussi vocation à aider à la reprise d'emplois dans les entreprises. Ce qui se passe en régions me rend optimiste : on peut dépasser l'objectif des 500.000 emplois-tremplins en cinq ans si on parvient à sortir de l'économie de la méfiance. Par ailleurs, les universités doivent s'investir dans le placement de leurs étudiants. En contrepartie, elles obtiendront l'autonomie sur leurs budgets.

Après vos consultations avec les partenaires sociaux, les sentez-vous prêts à sortir de ce que vous appelez l'économie de la méfiance ?

J'ai trouvé les syndicats beaucoup plus déterminés que le Medef. Ils ont envie d'entrer dans une nouvelle ère des relations sociales. Le Medef est plus crispé. Je l'ai trouvé en retrait par rapport aux attentes des PME. Le président du Centre des jeunes dirigeants a été beaucoup plus allant. A condition que la logique soit celle du " gagnant-gagnant ", les syndicats sont prêts au compromis social. C'est prometteur.

Quelle réforme de la représentativité souhaitez-vous ?

La représentativité doit être fondée sur l'élection. Les syndicats ne sont pas d'accord entre eux sur l'élection à retenir. Il faudra en discuter. De toute façon, je veux créer les conditions d'un syndicalisme de masse. L'essentiel est que plus aucun salarié n'ait peur d'adhérer à un syndicat.

Vous avez pourtant renoncé à l'adhésion obligatoire des salariés aux syndicats...

C'était une bonne idée, mais trop révolutionnaire pour l'instant.

Qu'est-ce qui relèvera de la négociation entre patronat et syndicats et de la décision politique ?

Sur tous les sujets, la négociation doit avoir le premier mot. Les solutions négociées sont toujours plus intelligentes et plus durables. Ainsi, la conférence sur les revenus et la croissance sera convoquée immédiatement. L'Etat garantira la qualité des négociations et fixera le cap, qui est d'augmenter le pouvoir d'achat. Ensuite, je fais confiance au dialogue social. Le Parlement sera là pour généraliser les accords sociaux et leur trouver des financements. L'une de mes priorités, c'est de réconcilier le pays avec ses entreprises. Comment le peut-il quand le CAC 40 affiche les plus gros bénéfices de son histoire et que les rémunérations des dirigeants sont insolentes, alors que les entreprises sous-traitantes n'ont jamais été autant en difficulté ?

Qu'est-ce qui vous choque particulièrement : les 100 milliards d'euros de bénéfices des grands groupes ?

Ce qui me choque, c'est qu'il y ait autant d'argent, d'un côté, et autant de dégâts sociaux, de l'autre. La logique de financiarisation est destructrice sur le plan économique. Il faut rendre plus transparente la répartition des profits, pour qu'ils soient réinvestis au service de l'emploi. Même les économistes les plus libéraux le disent !

Qui doit décider de cette répartition du profit : les actionnaires comme aujourd'hui ou l'Etat ?

La puissance publique doit aussi s'impliquer.

Etes-vous favorable à une hausse de la fiscalité sur le capital ?

Il ne s'agit pas de l'augmenter par esprit de système, mais d'avantager les entreprises de main-d'oeuvre.

Globalement, travaille-t-on suffisamment en France ?

Le pays doit travailler plus, bien sûr, mais en donnant du travail à ceux qui n'en ont pas aujourd'hui, les jeunes et les seniors. Les entreprises qui veulent faire des heures supplémentaires le peuvent déjà largement.

Comment envisagez-vous la généralisation des 35 heures, notamment pour les très petites entreprises ?

Les partenaires sociaux négocieront.

Vous évoquez souvent l'idée d'aides modulables ou conditionnelles aux entreprises. Pouvez-vous préciser ?

Je souhaite moduler les aides aux entreprises en fonction de leur politique en matière d'emploi, de leur engagement dans l'innovation, mais aussi de leur exposition à la compétition internationale.

Vous avez eu des mots très durs pour les banques...

Elles ne prennent plus de risques pour financer les entreprises, laissant aux collectivités locales le soin de le faire. Ce n'est plus acceptable. Elles doivent aider les PME à se développer.

Comment concevez-vous la modulation de l'impôt sur les sociétés ?

Je suis favorable à une baisse de l'impôt pour les entreprises qui exportent. Car le combat économique est de conquérir des marchés extérieurs.

Quelle serait l'ampleur de la baisse ?

Je n'ai pas, à ce stade, à entrer dans le détail. Ce sera au gouvernement et au Parlement de le faire.

Une entreprise n'exportant pas subirait à la fois la perte de ses allégements de charges et la hausse du SMIC à 1.500 euros... N'est-ce pas un peu lourd ?

Il y a des entreprises qui ont besoin d'aides, d'autres pas. Je veux aider les entreprises qui en ont vraiment besoin, et mettre fin aux effets d'aubaine. Partout, c'est la politique du donnant-donnant qui doit prévaloir.

L'Allemagne a restauré sa compétitivité en abaissant le coût du travail. La France n'a-t-elle pas besoin de cela plutôt que d'une hausse du SMIC et des bas salaires ?

Le pouvoir d'achat du salaire minimum est, en France, l'un des plus bas d'Europe. Et on peut être compétitif avec des salaires corrects pour les salariés.

Selon Eurostat, exprimé en parité de pouvoir d'achat, il est parmi les plus élevés...

Mais cette comparaison est effectuée sur la base d'indices des prix qui ne reflètent pas le pouvoir d'achat réel des bas salaires. C'est pour cela que je veux réinjecter du pouvoir d'achat. Ce n'est pas avec des emplois précaires, mal payés, à temps partiel qu'on aura des salariés motivés, efficaces.

Pour vous, la solution est-elle dans la TVA sociale ?

On connaît les inconvénients de la TVA sociale, qui n'est pas équitable socialement. D'une façon générale, je souhaite stabiliser les règles. Je suis favorable à ce qu'un cadre fiscal et social soit défini avant la fin de cette année, pour les années à venir. Les acteurs économiques ont besoin de visibilité.

Vous voulez maintenir le taux de prélèvements obligatoires ?

Oui. Je ne suis pas de ceux qui prétendent à la fois baisser les prélèvements et la dette. C'est impossible. Il faut être sérieux, sinon on décrédibilise le discours politique.

Sur ce point, vous êtes d'accord avec François Bayrou...

Il n'a pas de programme, François Bayrou, et il s'en vante !

Allez-vous revenir sur la réforme de l'impôt sur le revenu ?

Le nouveau barème a scandaleusement creusé les inégalités. Il devra être redébattu dans le cadre de la loi de Finances . Ce qui s'est passé sur les tranches les plus hautes n'est pas juste.

Pourquoi n'êtes-vous pas plus précise sur ce sujet ? Il est légitime que les Français connaissent vos intentions fiscales avant l'élection.

Je veux que cette question soit reliée au reste. Mon seul dogme en la matière est la justice et l'acceptation de l'impôt. Cela suppose que les Français comprennent ce qu'on fait de leur argent. Je suis favorable à un budget de l'Etat participatif, afin que les Français soient associés à la manière dont est utilisé l'argent de leurs impôts. Moi, je le fais dans ma région. Au niveau national, c'est plus compliqué, mais il faut y réfléchir.

Vous n'avez pas retenu l'idée de Dominique Strauss-Kahn d'un impôt sur les Français de l'étranger ?

Je ne pense pas qu'il faille taxer tous les Français de l'étranger pour empêcher quelques expatriations fiscales. Et je relève un paradoxe : la droite a voté le bouclier fiscal et certains de ses amis s'en vont quand même.

Vous ne toucherez pas à l'ISF ?

Non. Vous avez ouvert votre discours de Villepinte en dénonçant le poids de la dette, avant d'annoncer 100 propositions souvent très coûteuses. Où sont les économies ?

Sur la réforme de l'Etat, il y a des marges de manoeuvre. Nous devons avoir un Etat qui fonctionne bien et qui diminue son train de vie, même si c'est en partie symbolique. Je suis favorable par exemple à la diminution du nombre de ministères. Et puis surtout, il y a la décentralisation. Quand j'ai rencontré José Luis Zapatero en Espagne ou Romano Prodi en Italie, ils m'ont dit tous les deux que c'est par la décentralisation qu'ils ont réduit les dépenses de la collectivité.

Mais en France, la décentralisation s'est toujours traduite par un doublement des postes et des dépenses.

C'est cela justement qu'il faut éviter à l'avenir.

Y aurait-il obligation pour l'Etat de diminuer d'autant le nombre de ses agents ?

Oui. Jusqu'à présent, l'Etat a refusé de se délester et de perdre son pouvoir central. Moi je dis qu'il faut réajuster le nombre des agents publics en fonction des transferts de compétences.

Globalement, quand on raisonne Etat et collectivités ensemble, faut-il baisser les effectifs publics ?

Il faut un redéploiement assez drastique. Dire qu'on ne remplacera pas un fonctionnaire sur deux, comme le fait Nicolas Sarkozy, c'est inacceptable, car c'est détruire les services publics.

Et puis, c'est faire preuve d'un certain mépris pour les fonctionnaires que de leur dire qu'un sur deux ne sert à rien. La réforme nécessaire de l'Etat, la droite ne peut pas la faire parce qu'elle n'aime pas le service public. Moi, je la ferai, parce que je suis attachée au service public.

L'Etat doit-il revenir à 100 % d'EDF ?

Je suis favorable à une maîtrise réelle de l'Etat sur EDF. Et pourtant, je ne suis pas une dogmatique de la nationalisation. Les enjeux sont tels - constitution d'un pôle européen de l'énergie, développement des énergies renouvelables, avenir du nucléaire - qu'il est essentiel que l'Etat maîtrise ce secteur stratégique.

Vous critiquez beaucoup Nicolas Sarkozy, moins François Bayrou...

C'est faux. Son " on ne dépense rien " me paraît très dangereux. Seule une nation qui investit dans les capacités d'avenir - université, recherche, innovation - peut affronter la mondialisation et préparer son avenir.

 

par Thomas publié dans : Ségolène
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14 mars
Ségolène Royal : interview par PPDA sur TF1 - kewego
par Thomas publié dans : Ségolène
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13 mars
On vous connaît mal. Jamais sans doute un candidat ou une candidate majeur(e) à l'élection présidentielle n'a été à ce point méconnu des électeurs. Comment l'expliquer ?

Beaucoup de choses pourtant ont été dites, écrites. C'est un paradoxe. De nombreux livres et articles ont paru sur moi. Je suis dans le paysage politique depuis longtemps, mais, c'est vrai, les gens ont le sentiment d'en savoir moins sur moi que sur d'autres. Pourtant on m'a reproché de m'exhiber, ce qui est quand même assez étrange. Notamment quand mon dernier enfant est né. Donc je ne sais pas, je vous retourne la question… (rires)

Ce qu'on lit sur vous ce sont toujours les mêmes choses : vous êtes née en Afrique, vous êtes la fille d'un militaire, vous avez grandi dans une famille nombreuse, catholique, vous étiez bonne élève à l'école… Cette bio façon Who's Who ne résume pas une personne. Vous y retrouvez-vous dans ce portrait un peu caricatural ?

C'est vrai que j'ai connu cet itinéraire assez atypique : je suis issue d'une famille de huit enfants alors qu'il n'y en a plus beaucoup ; j'ai vécu jusqu'à l'âge de dix-huit ans dans un village très rural et je suis aujourd'hui là où je suis… C'est un itinéraire curieux. J'ai su saisir mes chances au fur et à mesure de la vie, je crois.

Vous éprouvez vraiment le sentiment d'être atypique ?

Oui parce que rien ne me prédestinait à arriver là où je suis. Je viens d'une famille plutôt de droite. Quand j'ai passé mon bac, je ne savais même pas que Sciences Po existait. C'est de fil en aiguille, en picorant des informations que j'ai choisi mon itinéraire d'orientation. Il s'est trouvé que j'étais à Nancy et que c'était la seule ville de France où il y avait une préparation à Sciences Po, qu'un jour ma sœur qui était secrétaire au rectorat m'a rapporté un dépliant qui présentait cette préparation. J'étais inscrite à la fac de sciences économiques - volontairement, parce que mon père ne voulait pas que je fasse d'études supérieures.

Pourquoi l'économie ?

Parce que j'ai fait un bac économique, voilà. J'ai donc ensuite découvert par ma sœur l'existence de cette préparation. Elle m'a dit tiens : toi qui t'intéresses à la politique… Parce que je m'intéressais quand même déjà beaucoup à la politique. Je regardais tous les débats politiques à la télévision. Quand j'étais en pension, je me souviens que j'allais toute seule dans la salle de télé regarder les débats avec Françoise Giroud. Ça m'a toujours attiré le débat public. Je me suis donc inscrite à cette préparation qui s'appelait le CUEP, et j'en suis sorti seconde et suis après entrée à Sciences Po à Paris. J'ai travaillé en même temps, j'ai obtenu une bourse. Et puis à Sciences Po, j'ai appris que l'ENA existait. Je n'étais pas une initiée du milieu. Je me suis retrouvée avec des fils d'énarques, des enfants de gens de la haute fonction publique. Mais je n'étais pas du tout complexée. Sans doute pas très consciente de l'incongruité de ma présence dans ce milieu. Et puis j'ai été reçue à l'ENA et j'en suis sortie. On était en 1980 et c'était bientôt l'élection présidentielle. À ce moment-là François Hollande m'a fait rencontrer Jacques Attali, pour lequel j'ai travaillé, dans une soupente pas très loin d'ici à élaborer des réponses à des questionnaires. Et puis après l'élection, en 1981 j'ai été happée dans l'équipe Attali au 2 rue de l'Elysée dans un petit bureau annexe. J'ai fait mon trou, préparé des dossiers, bâtit des argumentaires… Il y avait un espace et je me trouvais là, c'est comme ça que j'ai été associée à la préparation du sommet de Versailles, le premier sommet des chefs d'Etat des pays industrialisés. C'était un peu le happening au départ en 1981. Un jour, on m'a dit tiens il faut faire un rapport pour François Mitterrand, préparer ce qu'il va dire au sommet. Rien ne m'étonnait : je devais avoir 24 ans, et je faisais le discours de François Mitterrand pour le sommet des chefs d'Etat…

En pension, vous vous intéressiez déjà dites-vous à la politique. Etait-ce dans un rôle d'observation ou bien aviez-vous déjà des opinions politiques très formées ?

C'est par le féminisme, je crois, par la question du droit des femmes que mes opinions se sont forgées. Avec la réalisation assez précoce qu'il fallait se battre pour y arriver. Donc tout naturellement à gauche. Mais ce n'était pas en réaction viscérale, comme cela a pu être dit, contre le milieu familial. Non. Par la prise de conscience de l'injustice faite aux femmes. C'étaient des années où ces questions étaient très débattues.

Quand avez-vous pris du conscience du fait que le modèle de vie plus ou moins imposé par vos parents n'était pas fait pour vous ?

En sixième. Très tôt. La sixième, c'est le retour de Martinique. Je sortais d'un établissement privé de religieuses, j'ai donc dû passer un examen pour entrer à l'école publique, et on m'a fait redoubler ma sixième, ce qui m'a peut-être fait du bien, d'ailleurs, parce que j'avais un an d'avance et j' j'étais toute jeunette. Alors je me suis retrouvée dans un collège rural d'un chef-lieu de canton des Vosges, Charmes. Pendant quatre ans, j'étais la meilleure élève de ce collège. Ça m'a tout de suite ouvert des perspectives : je me suis dit que je pouvais quand même avoir un autre destin que celui des femmes de ma famille qui ne travaillaient pas.

Des enseignants ou des camarades de classe ont-ils été déterminants ?

Des enseignants, oui, qui m'ont tout de suite poussée, qui m'ont dit qu'il fallait vraiment continuer.

Vous étiez meilleure dans certaines matières ?

Non, j'aimais toutes les matières.

Des matières que vous préfériez alors ?

Non, vraiment, j'aimais tout. J'adorais l'école. C'était un moyen de m'affranchir. Je suis un pur produit de l'école émancipatrice.

Avant l'école ou à côté, dans la famille, il n'y avait pas d'autres horizons ?

C'était dur, mais il y a toujours eu un horizon parce qu'on a vécu outremer, et ça procure des échappées imaginaires au moins. Ne serait-ce que l'imaginaire de ma naissance, c'est peut-être cela aussi qui m'a poussée…

Pourquoi c'est important pour vous d'être née à Dakar ?

Être née en dehors des frontières, c'est un plus, oui. C'est la biodiversité ! C'est le mystère. Quand on est petite et qu'on est née à Dakar, Sénégal, on est contente. Ça m'a marquée toute mon enfance. Quand à la rentrée je disais née à Dakar, Sénégal, toute la classe faisait ohhh. C'est le genre de petites choses qui marquent très fortement une identité, je pense.

À vous entendre, on a le sentiment que vous avez toujours vécu dans un statut d'outsider…

Un peu oui… Dans le débat interne au PS aussi, vous vous souvenez (rires). Et même maintenant, vous avez vu ce qui se passe… (re-rires)

Est-ce parce que vous avez toujours eu le sentiment de vivre ainsi que cette position d'outsider ne semble pas vous poser problème ?

Oui même s'il faut aussi à chaque fois de l'énergie pour s'imposer.

Enfant, y avait-il à la maison des livres ? alliez-vous au musée, au cinéma ? Quelle place occupait la culture ?

Des livres oui, parce que ma mère qui a fait une école agricole et n'a pas le baccalauréat a une culture rurale. Tout petits elle nous faisait faire des herbiers, observer la nature, mon grand-père nous apprenait les champignons… Il y a là une forme de culture originale, une éducation scientifique, botanique qui nous ouvrait l'esprit. Et puis j'ai toujours vu ma mère lire, aller à la bibliothèque du village, et parler de ce qu'elle lisait. Mon père avait une collection de livres de poche qui couvrait tout un mur.

Quelle place occupait la religion dans votre famille ? Et quel rapport vous-même entreteniez-vous à elle ?

Le rapport était très étroit, j'étais dans une famille très pratiquante. Pour moi, la religion a structuré à la fois la pensée et la transgression. C'est ça qui est très intéressant. Car quand j'ai pris conscience de l'écart entre le discours et les actes, je me suis dit, il y a quand même un problème. La religion fut un structurant culturel mais très vite, je l'ai aussi perçu comme une contrainte, comme la transmission d'un dogme, d'une discipline qui ne permettait pas l'épanouissement. Même si c'état aussi un repère, une identification. Ce qui est intéressant ensuite, c'est l'affranchissement. En comparant l'enseignement religieux avec ce qui se passait réellement, y compris au sein de ma propre famille, je voyais vite le problème . Sur la question de l'égalité hommes/femmes, sur celle du respect… Je voyais bien que ça n'allait pas.

Et aujourd'hui quel est votre rapport à la religion ?

Je ne suis pas pratiquante. Je défends très farouchement la laïcité, et en même temps je comprends les identités religieuses et le respect qu'on leur doit, par rapport aux convictions des gens. Ce sont des élements structurants de l'histoire, de la culture, des mentalités, c'est important de comprendre comment les gens réagissent. Je soutiens le dialogue interreligieux. Il faut comprendre la diversité du peuple français, dans ses identités religieuses ou, au contraire, non religieuses.

Vous parliez de la passion de votre mère pour les livres, y t-il une passion que vous avez partagé avec votre père ?

La musique peut-être. Il écoutait beaucoup de musique classique. Ça imprègne une enfance.

Et pour le reste, c'était difficile de partager avec lui ?

Difficile, oui. Il était lui-même victime d'une éducation rigide, le dialogue parent enfant existait peu, comme dans beaucoup de familles à l'époque. L'évolution des droits de l'enfant, tout cela est assez récent. Mais je n'ai pas été maltraitée. On m'a appris l'obéissance, l'honneteté, la rigueur, la discipline … Ça permet de réagir, de s'en affranchir.

De tous vos frères et sœurs, vous êtes celle qui s'en est le plus affranchi ?

Non, tous. Chacun à sa manière. Mais c'est une belle histoire. Parce qu'il y a des enfants qui ne vivent rien. Auxquels on autorise tout. Qui vont à vau l'eau, qui sont en souffrance parce qu'ils n'ont rien en face. Ils ont tout ce qui veulent. Ça n'a pas été mon cas - ça c'est sûr. Mais le principe même de l'éducation, c'est la limite. Il faut simplement qu'elle soit bienveillante et adaptable, cette limite.

Et quel a été votre rapport à l'autorité non plus parentale mais scolaire ?

Très bon. De toute façon c'était une époque où les élèves obéissaient. Il n'y avait pas beaucoup d'espace (rires)…

Vous entrez en pension en seconde. Pour beaucoup c'est un enfermement, mais pour vous ça semble presque une délivrance…

Oui c'était une libération bien sûr. Le milieu familial étant un peu étouffant, le milieu scolaire était un milieu de liberté. Pour beaucoup d'élèves, la pension peut devenir un élément de liberté, de confort de travail…

Y avez-vous rencontré des professeurs très marquants, importants ?

Non pas tellement en pension. Davantage au collège. La professeure qui m'a le plus marqué, c'était une PEGC, une ancienne instit devenue prof d'allemand. Elle s'appelait Marguerite, je m'en souviens encore, elle était d'une bonté ébouriffante, et en même temps d'une grande rigueur. Elle adorait les élèves, entraînait toute la classe. Il n'y avait pas d'humiliation. Ça m'a beaucoup marqué les mauvais élèves humiliés. C'est dur le milieu scolaire quand est mauvais élève. Je me souviens encore du visage des mauvais élèves humiliés. Des élèves auxquels on balance les copies en leur disant : zéro, t'es encore nul ! Je vois encore les visages de ces élèves. Et c'est ce souvenir très fort qui, lorsque j'étais ministre de l'enseignement scolaire, m'a conduit à réformer la notation. Un élève n'a pas le droit d'être enfoncé. Même si le devoir ne vaut rien, ce n'est pas l'élève qui est nul, c'est le devoir qui n'est pas fait. On lui refait faire, c'est tout.

Vous faites un lien entre cette violence scolaire là, et celle qu'on peut observer, dans l'autre sens, des élèves à l'égard de l'école ?

Oui, bien sûr. Il y a des élèves qui retournent la violence contre l'école parce que l'école a échoué avec eux. Il y a une violence contre l'école parce qu'il y a une demande d'école aussi. Hélas.

En 1968, vous avez 15 ans…

Oui j'étais en troisième et c'était formidable 68. Nous, on ne faisait pas grand chose, on a dû s'arrêter deux jours. Et puis moi je prenais le ramassage scolaire et dès que le car est passé on n'a plus la chance de traînasser devant le collège… Beaucoup d'élèves de milieu rural vivent ça, ils prennent le car, rentrent chez eux et après c'est l'isolement. Mais je m'en souviens encore, je sentais que le joug de l'autoritarisme était un peu secoué.

C'est à ce moment que se politise un peu votre vision des choses ?

Ce n'est pas impossible, oui.

Vous disiez que vous regardiez les émissions politiques à la télévision seule, vous ne partagiez pas cet intérêt avec vos camarades de classe ?

Ça n'intéressait pas les filles de mon âge à cette époque là.

Et avec le recul comment voyez-vous mai 68 ?

De manière positive. Je ne fais pas partie de ceux ou celles qui passent mai 68 par pertes et profits, qui lui font porter la responsabilité d'une confusion des valeurs. Il y a eu une confusion des valeurs comme pour toute époque un peu tourmentée. Après il a fallu recadrer un certain nombre de choses, notamment sur l'éducation des enfants, des choses comme « il est interdit d'interdire » etc. Mais sans doute cette transition était-elle nécessaire pour chambouler, pour rebattre les cartes de l'organisation de la société. Ce sont des mouvements de libération qui sont extrêmement refondateurs.

Récemment l'hebdo des socialistes à fait sa une sur avoir 20 ans en . De quoi aviez-vous envie à 20 ans ?

De liberté. D'insouciance. J'étais à l'université, j'étais heureuse.

Vous vous imaginiez faire quoi plus tard ?

Pas de la politique, j'avais aucune idée de qu'était un mandat, un engagement politique. Mais la chose publique déjà m'intéressait, le droit… Magistrate, je pense que c'est ce que j'avais à l'esprit.

Est-ce que votre aspiration à la rébellion, à l'affranchissement s'incarnait dans des personnalités que vous admiriez ?

Je me souviens avoir été vraiment secouée par la lecture, en terminale d'un livre de John Stuart Mill, De l'assujettissement des femmes. C'est un livre prodigieux d'actualité. La lecture de Simone de Beauvoir fut également importante. La biographie de Flora Tristan. Mais le premier livre qui a éveillé ma conscience politique c'est ce livre de John Stuart Mill.

Vous évoquiez François Giroud dans les débats télévisés…

Voilà quelqu'un à qui je m'identifiais. Féministe, intelligente, maîtrisant la parole, la dialectique, la modernité, L'Express…

L'Express, vous lisiez beaucoup la presse ?

Oui, étudiante je lisais les journaux.

Et à côté des figures intellectuelles ou politiques, certains artistes ont-ils joué pour vous un rôle important ?

Le premier film qui m'ait marquée, c'était West Side Story.

Les artistes, c'était Yves Montand, Léo Ferré, mais aussi la chanson populaire, Françoise Hardy, Christophe, Michel Polnareff. Et puis Simon and Garfunkel, au moment où je faisais du baby sitting en Irlande pendant les vacances, Leonard Cohen. Mais j'ai toujours aimé la musique classique, je ne peux pas m'en passer, Bach surtout, les concertos brandenbourgeois, le Requiem de Mozart…mon grand-père me faisait écouter de l'opérette quand j'étais enfant, j'aimais cela, les Contes d'Hoffmann…

Mes derniers spectacles, c'était Don Juan à l'Opéra Bastille, Philippe Caubère au Théâtre du Rond-Point…

Des choses très mélancoliques…

Oui, romantiques aussi.

Qu'avez-vous appris de plus important dans vos années à l'Elysée ?

Que la relation interpersonnelle était finalement ce qui était le plus efficace en politique. Même sur les sommets internationaux où l'on se dit que tout est calibré, bouclé à l'avance, François Mitterrand trouvait les moyens de dire : non ce n'est pas comme ça, ce sera comme ci. Ou : ce que vous m'avez préparé là ne tient pas debout, la ligne politique sur laquelle il faut tenir c'est celle-là. Ça marchait. L'obstination de l'action politique, de la cohérence de la pensée politique, si on la mène jusqu'au bout parce qu'on la tient fermement, ça marche.

Ça veut dire qu'il y a toujours une marge de manœuvre politique ?

Oui, la volonté politique déplace les montagnes. L'impossible devient possible. J'ai appris ça de François Mitterrand. Vu ce qu'il avait traversé pour être là, il était habité de la volonté politique. Au moins pendant le premier septennat. Il y avait une volonté permanente, il ne fallait jamais se laisser tordre dans des voies détournées, ou de se laisser imposer des choses qu'il ne sentait pas ou qui n'étaient pas conformes à sa route. Il avait la capacité de se secouer, de dire : ce n'est pas ce que je veux, ce n'est pas dans cette direction là que je veux aller, ce n'est pas ça l'horizon.

Avez-vous eu le sentiment qu'il fallait choisir entre Mitterrand d'un côté et Rocard et Delors de l'autre, entre première et deuxième gauche ?

Non, je n'étais pas du tout là-dedans. Ce n'était pas mon problème. J'étais au service de François Mitterrand. Je voyais bien les débats mais comme j'étais dans mes dossiers et non au cœur des problématiques politiques je n'avais pas tellement conscience des conflits. J'étais dans l'action, j'avais des sommets à préparer, des rentrées scolaires… Tout ce qui n'était pas attribué m'était confié : les jeunes, les problèmes de société, l'environnement… Très tôt, j'ai eu pendant ce premier septennat l'occasion de me pencher sur ces questions. Avec une grande curiosité. Je lisais tout, je rencontrais des gens, je faisais des notes, je regardais les enquêtes d'opinions, je faisais remonter tout ça à François Mitterrand, je lui faisais humer ce qui se passait, ce qui se disait. Tous les jours.

Au fur et à mesure que vous avez pris des responsabilités liés à vos mandats et à vos fonctions ministérielles, vous avez eu moins de temps pour tout cela, est-ce frustrant ?

Non parce que j'y passe encore beaucoup de temps.

Et vous pensez que c'est compatible avec la fonction présidentielle ?

C'est indispensable. Et puis il faut aussi avoir des gens autour de soi qui respirent, qui sont en palpitation. C'est ce que permet la démocratie participative. Et internet sur lequel je regarde ce qui remonte du terrain tous les jours. Tout est dit. Il faut le vouloir pour se couper du monde. Mais c'est vrai qu'il faut aussi le vouloir pour rester en contact.

Comment expliquez-vous que le mot culture soit à ce point absent de la campagne ?

Même si je n'ai pas encore prononcé mon grand discours sur la culture, j'en ai déjà beaucoup parlé. La réussite éducative, je l'ai toujours liée à la culture. J'ai dit qu'il fallait remettre de la culture partout.

Mais pourquoi a-t-on l'impression que ce n'est pas un enjeu de cette campagne ?

C'est vrai que la culture intervient tard dans la campagne. Grâce à vous, nous y voilà !

Les grandes lignes de la politique culturelle actuelle ont été définies en 1981 lors de l’arrivée de la gauche au pouvoir. Cette politique vous paraît-elle adaptée à l’époque que nous vivons ? S’agit-il de la modifier, de l’améliorer à la marge ou de la repenser plus profondément ?

En 1981, tout était à faire. Les politiques mises en place par la gauche ont permis l’éclosion d’une vie culturelle foisonnante. Depuis 25 ans de grands bouleversements ont profondément transformé le paysage culturel.

De nouvelles formes d’expression artistique ont émergé, des espaces inédits de rencontre entre le public et les créateurs se sont ouverts. Je pense en particulier à l’irruption d’internet dans la vie de chacun, notamment les jeunes.

Mais reconnaissons-le, des menaces et des dangers nouveaux se font jour. La richesse de notre vie culturelle ouvre des perspectives extraordinaires mais est aussi porteuse de dérives inquiétantes pour les artistes comme pour les citoyens : les sous-financements, les risques de concentration, les menaces de paupérisation des artistes, l’assèchement des représentations collectives et des identités, la mise en cause de la diversité, la perte de sens, les disparités d’accès à la culture sur l’ensemble du territoire. Les grandes concentrations mettent en péril la diversité de la création.

Comme le dit la grande écrivaine Toni Morrisson, « aujourd’hui tout est su, rien n’est compris. »

Je veux remettre de la pensée et de la volonté dans la politique culturelle de notre pays. C’est la mission historique de la gauche en matière de culture.

Il y a dans notre pays un profond désir de changement. Il y a le sentiment que la politique culturelle de l’Ėtat est en panne et les cinq années de droite ont accéléré la dégradation dans beaucoup de secteurs, notamment ceux du patrimoine. C’est une véritable catastrophe.

La gauche ne peut pas se penser sans la culture, ne doit jamais cesser de parler culture, de penser la culture, de vouloir la culture.

L’univers culturel s’est trouvé bouleversé ces dernières années par la révolution numérique, et c’est loin d’être fini. Comment la politique culturelle doit-elle prendre en compte ces nouvelles technologies et surtout leurs effets économiques, sociaux, juridiques et esthétiques ?

Constatons-le, les pouvoirs publics en matière culturelle et audiovisuelle ont traité la révolution numérique avec une triste désinvolture, donnant ainsi l’impression à nos concitoyens d’avoir toujours un train de retard.

Je veux que dans ce domaine la France soit à l’avant-garde.

Je suis heureuse de l’éclosion sur internet de nouveaux modes d’expression qui doivent tout à la vitalité créatrice de nos concitoyens et en particulier de notre jeunesse. Mais je ne confonds pas ce qui est l’expression d’une envie de culture et la démarche patiente, élaborée, exigeante, de l’artiste. L’un et l’autre sont indispensables. Il y a deux cents ans la France a inventé le droit d’auteur. Il n’est de grande nation que celle qui sait honorer ses artistes et leur donne les moyens d’exercer cette responsabilité singulière de témoin, de veilleur, de défricheur et surtout d’inventeur, qui sait les aider à suivre cette intuition qui les anime.

Quel que soient les chemins empruntés par les artistes pour trouver leur public, leur talent et leur travail doivent obtenir une juste rémunération.

Je veux qu’un large débat soit lancé dans tout le pays sur l’économie de la culture à l’ère numérique, pour refonder le pacte social entre la nation et ses artistes.

L’univers culturel s’est également trouvé affecté par la profonde transformation du capitalisme, entraînant notamment d’important mouvements de concentration. Comment dès lors garantir la diversité culturelle ?

Si l’on fixe bien les objectifs, s’ils sont bien compris, on trouvera les bons outils. Empêcher par exemple quelques grands groupes qui tirent leur puissance d’autres secteurs, notamment le BTP, les télécoms ou l’industrie militaire, de s’emparer progressivement de tous les médias, ce n’est pas lutter contre l’entreprise mais c’est veiller au pluralisme de l’information et à la diversité culturelle. Il faudra ainsi qu’une nouvelle législation travaille sur la définition et les critères des seuils de concentration, et ce sans doute à l’échelon européen. Aucun secteur aujourd’hui n’est épargné : la presse, l’audiovisuel, l’édition, le cinéma, la musique. Je serai de ce point de vue d’une vigilance absolue. Je veux par exemple soutenir les librairies indépendantes, dont le rôle de soutien à la diversité de la production littéraire et de lien social est indispensable. Faut-il rappeler que c’est la gauche qui a fait la loi Lang sur le Prix Unique du Livre ? je continuerai dans cet esprit.

Le développement des industries culturelles et ces phénomènes de concentration ont conduit à la constitution de groupes de culture et de médias, au point que certains chercheurs parlent aujourd’hui de médiaculture, comment articuler ces deux dimensions ?

Je vois que vous faites allusion au livre d’Eric Macé et Eric Maigret.

Incontestablement nos pratiques culturelles se déploient sur un territoire dont les frontières sont ouvertes. La distinction entre culture populaire et culture élitaire, qui générait des inégalités, n’est pas pertinente pour analyser la réalité des pratiques culturelles de nos concitoyens. Dans la même journée, nous pouvons voir une série télévisée, écouter un air d’opéra, aimer les romans de Gao Xingjian et écouter Abdelmalik ou le slam de Grand Corps Malade. Ce que l’on appelle les « cultures urbaines » sont par exemple le signe d’une vitalité réjouissante, elles ne doivent pas être ghettoïsées !

Ce décloisonnement est une réalité. Mais la possibilité accrue d’accès aux œuvres ne doit pas faire oublier que la démocratisation de l’accès à la culture reste un défi majeur, ce qui n’est pas garanti encore sur l’ensemble des territoires et des milieux sociaux.

Il ne faut pas non plus évacuer la question de la spécificité de l’art.

On ne peut imaginer une démocratisation culturelle sans artistes.

C’est à l’intersection de ces deux éléments , j’allais dire dans cette tension, médiaculture et art, que les politiques culturelles de demain s’inscriront. Ariane Mnouchkine dit : « nos enfants ne doivent pas seulement devenir des fabricants ou des consommateurs mais des êtres humains amoureux de l’humanité ». J’ajouterai : des citoyens libres, autonomes, capables de décider pour eux-mêmes et pour les autres, et de conquérir l’esprit critique, au sein de cette nouvelle République culturelle que j’appelle de mes vœux.

Quelle sera votre politique en matière d’audiovisuel public ?

La télévision devrait jouer un rôle essentiel, en étant l’espace privilégié du contact quotidien des Français avec la culture. Je dis bien « devrait », car elle renvoie souvent une image très éloignée de la réalité de notre pays.

Dans nos communes, dans nos région, la vie culturelle et artistique est foisonnante. Les cultures urbaines, les pratiques amateurs, les réseaux numériques, l'essor des identités culturelles et des langues régionales, auxquelles je suis très attachée… Partout se vérifie cette volonté d'agir et de créer, à laquelle la télévision n’offre pas ou peu de relais. Pourquoi n’y a-t-il pas de grande émission sur les arts plastiques ? Le cinéma ? La littérature ? L’histoire et le patrimoine ? La photographie ou le design ? Parce que la défense de notre identité et notre richesse culturelles, la diversité et la qualité des programmes, passent après les objectifs de rentabilité ?

Jamais je n’accepterai que la culture et l'information soient abandonnées aux seules forces du marché et à la marchandisation galopante, induite par la mondialisation libérale.

Comment concilier liberté d’entreprendre et liberté de créer ? Comment conjuguer l’efficacité économique, le soutien à l’innovation, et le pluralisme des idées, des créations, des publics ? Sortons de cette opposition absurde et stérile. Et donnons à notre pays les moyens de se doter d’une politique audiovisuelle forte, qui place tous les acteurs de cette filière, publics et privés, face à leurs responsabilités : garantir collectivement le pluralisme et la qualité de la création et de la production françaises.

Il faut développer et adapter le service public de la culture et de la communication aux nouveaux enjeux : être au service d'une information libre, d'une création audiovisuelle et cinématographique de qualité et dynamique (les fameux « films du milieu » dont parle Pascale Ferran), de programmes qui conjuguent attractivité et qualité.

Pour cela, j’entends créer les conditions d’un service public de la culture et de l’audiovisuel, fort et dynamique. Quelques initiatives y contribueront :

-La mise en place d’un Conseil Supérieur des Savoirs, des Arts, et des Sciences, directement placé auprès du chef de l’Etat, qui aura une mission d’observation, d’information, de proposition, fondée sur un constant dialogue avec tous les acteurs du monde culturel.

-La transformation du Conseil économique et social en Conseil économique, social et culturel, afin que la culture soit placée au centre, et non plus à la marge, de la réflexion sur les sujets de société, au même titre que l’économique et le social.

-L’instauration d’une Haute Autorité du Pluralisme, en lieu et place du CSA, dont le Parlement aura la responsabilité de nommer les membres, à une majorité des 3/5èmes. Ses pouvoirs seront élargis, afin de garantir, mieux encore qu’aujourd’hui, la liberté de la presse et des médias, mais aussi d’élever le niveau d’exigence culturelle des médias audiovisuels.

Il faut aussi poser la question des moyens de l’audiovisuel public, et de ses modes de financement, qui ont peu évolué depuis sa création, il y a un demi-siècle, alors qu’il n’existait qu’une seule chaîne de télévision publique. Le sous-financement de l’audiovisuel italien a participé de la stratégie de Berlusconi pour bâtir son empire aux dépens de la RAI. Est-ce vraiment cela que nous voulons pour notre pays ? Entre l’anti-modèle berlusconien qui a vulgarisé la télévision et le modèle de nos amis allemands, anglais et scandinaves qui assure la suprématie de la création, je choisis évidemment le second.

Si je suis élue, je lancerai ce débat, en y associant les Français, puisque la quasi-totalité possède la télévision et la radio dans leur foyer. Nous avons, vis-à-vis d’eux, un devoir de vérité sur les moyens aujourd’hui dévolus au service public de l’audiovisuel, et de transparence sur la production des programmes, notamment à l’heure du tout numérique, de la TNT et d’Internet.

Autant d’outils dont j’estime qu’ils doivent aussi permettre de dégager de nouvelles ressources pour la production et la diffusion d’œuvres françaises et européennes de qualité, qui soutiennent vraiment la création de qualité. Aujourd’hui, il me paraît indispensable que les fournisseurs d’accès à Internet contribuent vraiment au financement de l’audiovisuel et du cinéma français.

L’Institut national de l’audiovisuel, en rendant accessibles gratuitement sur son site Internet les trésors de notre patrimoine audiovisuel est un exemple à suivre pour lutter contre les risques de nivellement et d’uniformisation, et faire de l’outil numérique un véritable espace de création intellectuelle, d’échange de savoirs et de compréhension du monde.

Enfin, il faudra une bonne fois pour toutes mettre à plat le dossier de l’audiovisuel extérieur (TV5, France 24, RFI) et répondre au mal endémique de la dispersion des moyens et du manque de coordination. Ce dossier a été géré en dépit du bon sens ces dernières années.

Faut-il une véritable politique pour le secteur des médias privés et en particulier la presse qui connaît une crise grave ?

Le pluralisme et l’indépendance de la presse sont menacées de manière dramatique. La situation des grands quotidiens français et le problème de leur distribution sont un péril pour la démocratie.

Je ferai en sorte que la presse écrite puisse trouver un environnement favorable à son renouveau : réforme des financements publics avec une indexation des aides sur de nouveaux critères (l’importance de la rédaction notamment) , fiscalité, création d’un statut des entreprises de presse.

Il faut garantir aux titres qui le souhaitent une indépendance économique et donc éditoriale. Il faut absolument trouver une réponse au problème structurant et handicapant de la faiblesse des fonds propres des entreprises de presse, grâce, pourquoi pas ?, à un nouveau mécanisme de déductions fiscales incitant les particuliers à rejoindre les sociétés de lecteurs.

A l’heure où ce secteur connaît un bouleversement majeur et historique, celui du numérique, les pouvoirs publics doivent avoir une politique active d’accompagnement de ce secteur indispensable à la vie de notre démocratie.

Après médias/culture, une autre couple médias/école. Vous avez à de nombreuses reprises insisté sur une meilleure articulation. Quelle place pour la culture à l’école, et quelles places pour les écoles dans la culture ?

Je veux que la culture fasse une entrée massive à l’école. C’est le premier lieu de la rencontre de tous avec l’art et de la réduction des inégalités d’accès à la culture. Ce que Jules Ferry a réalisé pour le calcul et la lecture, nous avons le devoir de le faire aujourd'hui pour les arts.

Ce doit être une vraie révolution, qui commencera par la reconstruction ce que la droite a défait, en démantelant le plan « arts à l'école », initié en 2000 sous l'impulsion de Jack Lang et Catherine Tasca. Ce plan ait été sabordé par le gouvernement auquel appartient le candidat de la droite à l'élection présidentielle : quelle crédibilité de bâtisseur peut bien avoir le démolisseur ?

Moi, je veux que tous les jeunes puissent voir leur sensibilité et leur esprit critique s’éveiller, par le contact personnel avec les œuvres, la découverte des lieux de création, la rencontre avec les artistes. Je veux encourager les pratiques artistiques, notamment celles qui sont collectives, parce qu’elles sont le meilleur moyen de faire l’expérience de la vie en communauté, d’en apprendre les règles, et même de lutter contre la violence.

De la maternelle à l’université, je veux renforcer la présence de toutes les disciplines artistiques et l’éducation aux images. Le rôle essentiel des bibliothèques-médiathèques doit aussi être soutenu.

Renouons avec l’esprit du Conseil National de la Résistance qui traçait comme perspective « la possibilité effective pour tous les enfants français de bénéficier de l’instruction et d’accéder à la culture la plus développée, quelque soit la situation de fortune de leurs parents ».

Dans un livre récent sur la politique culturelle américaine, Frédéric Martel insiste sur le formidable gisement d’emploi que peut constituer la culture et plus généralement ce qu’on appelle la crative class. Que faire pour encourager ces emplois ?

Mon premier engagement sera de défendre les emplois culturels, et de faire de la culture l’un des moteurs de l’innovation économique. La culture et l’audiovisuel, filières à part entière, sont l'une des clés d'une économie moderne dans un pays développé, porteuses d’innovation, vecteurs de croissance, et créatrices d'emplois, dans le secteur public comme dans le secteur privé.

Je veux que les entreprises culturelles et audiovisuelles, qui constituent un tissu très dynamique, soient reconnues pour le rôle qu’elles jouent dans l’économie de notre pays. A ce titre, elles auront toute leur place au sein du pacte que je propose avec les PME, et pourront bénéficier de tous les moyens que j’entends mettre en place pour faciliter et soutenir les projets les plus innovants.

Nous devons être à la hauteur de ce qui fait notre force et notre identité : une certaine idée de la culture et du rôle des créateurs. C’est, pour moi, tout le sens de la notion d’exception culturelle que je veux défendre. Ce n’est pas seulement, comme le croit la droite qui en a dévoyé l’idée, un instrument pour échapper aux règles du commerce international ! C’est l’expression la plus belle et la plus noble du traitement exceptionnel dont la culture et les arts doivent bénéficier, par leur nature et par leur fonction. L’économie de l’art, c’est d’abord celle de l’imaginaire.

Ce traitement exceptionnel, je m’engage à l’enrichir, par des droits spéciaux, des financements spécifiques, des dispositifs particuliers. Contre la logique du profit immédiat, c’est du temps que l’exception culturelle doit offrir aux créateurs : le temps de la naissance de l’œuvre, comme celui de sa rencontre avec le public.

Faire vivre l’exception culturelle, c’est véritablement inscrire la solidarité au sein du monde de la culture et de la pensée. C’est donner les mêmes chances à toutes les formes d’expression artistiques, des plus populaires aux plus avant-gardistes, des plus médiatisées aux plus confidentielles. C’est garantir la diversité des œuvres, des artistes, des entreprises, des sources de financement, au service d’une seule ambition : permettre que la création reste libre et plurielle.

Depuis des années maintenant la question des intermittents se pose sans trouver de solution, comment compter vous régler le problème ?

L’intermittence était un régime unique au monde, qui a été cassé par le gouvernement sortant. Les métiers de l’art et de la création sont incertains, irréguliers, parfois saisonniers. Le régime spécial de l’intermittence assurait une certaine régularité des revenus et une péréquation entre les plus privilégiés et les plus précaires. C’est la solidarité interprofessionnelle qui doit être rétablie à tout prix. En brisant ce régime le gouvernement a porté un coup à la création.

Dès mon élection, je m’engage à remettre sur le métier, avec les partenaires sociaux, le nouveau protocole qui vient d’être signé, car il est contraire à la philosophie qui a présidé à sa création : la solidarité entre les professions et entre les générations, la mutualisation.

Je partage ce que disait très justement Pascale Ferran lors de la soirée des César : « Sous couvert de résorber un déficit, on exclut les plus pauvres pour indemniser les plus riches ».

Il faut aussi des incitations fortes pour que les entreprises culturelles et audiovisuelles transforment nombre de contrats d’intermittents en CDI, comme l’exige le Code du Travail.

Cette réforme s’impose, non pas au nom d’avantages acquis, mais parce que l’équité et l’efficacité du système sont la condition de la vitalité artistique et culturelle de notre pays, elle-même condition du dynamisme économique et social de la France et de son rayonnement.

N’y t-il pas une inégalité forte entre les domaines : les plasticiens, les écrivains ne bénéficient aucunement de ce type de statut.

Je ne souhaite pas découper en clientèles le monde artistique. Les différents secteurs culturels n’ont ni la même réalité, ni les mêmes réseaux artistiques ni les mêmes circuits économiques. Une des bases de l’intermittence dans le spectacle, le cinéma, l’audiovisuel, c’est la présomption de salariat. Dire que demain les écrivains et les plasticiens deviendraient des salariés ne serait pas réaliste et serait surtout dangereux. Pour autant, cela ne doit pas nous conduire à maintenir des cloisonnements alors que les arts s’hybrident et se métissent, que les disciplines se rencontrent et fusionnent, écriture, spectacle vivant, jeux... Une fois le système de l’intermittence remis sur pied et les blessures soignées, j’ouvrirai très vite avec l’ensemble des partenaires le chantier de l’emploi culturel avec toutes les professions. Je crois en particulier qu’il faut que nous réconciliions le droit du travail et le droit de la propriété intellectuelle comme nous avons su le faire dans les années 80 en reconnaissant les droits des interprètes.

Je souhaite la valorisation des gisements nombreux d’emplois culturels de la maternelle à l’université, dans les nouvelles technologies et la médiation culturelle. La rénovation des universités passera aussi par la culture : il faut mieux équiper les campus et favoriser les pratiques artistiques de tous les élèves et les étudiants.

Aux Etats-Unis, il existe un tiers secteur très fort, ne pourrait-on pas imaginer créer en France aussi un statut d’organisation non profit qui serait soumises à d’autres règles juridiques, sociales et fiscales ?

D’abord je veux renouer avec l’audace de ceux qui avaient porté l’exigence que le budget de la culture atteigne 1% du budget de l’Etat. Si je suis élue, la culture sera une de mes priorités budgétaires : je redonnerai à la culture les moyens qu’elle avait durant les meilleures années des gouvernements de gauche. Les entreprises de l’économie sociale et solidaire y auront aussi leur place.

Je veux, aussi, relancer la décentralisation culturelle, en renouant avec l’esprit de 1982. Aujourd’hui, les communes, les départements, les régions, les structures intercommunales, sont devenus les premiers financeurs de la culture. Ces dernières années, des politiques culturelles locales ambitieuses et novatrices se sont souvent substituées à un Etat silencieux, voire défaillant.

Je n’entends pas être la Présidente d’un Etat qui se défausse sur les collectivités territoriales. Dans le domaine des arts et de la culture, je veux un Etat fort, attentif, impliqué. Mais qui permette, aussi, aux régions, aux départements, aux villes, d’avoir une réelle capacité d’initiative, en leur donnant les moyens financiers et humains de porter de nouveaux projets, et de participer concrètement à l’aménagement culturel de nos territoires.

Complémentarité des rôles, responsabilités partagées : c’est aussi cela, un véritable service public de la culture, tel que le souhaitait Jean Vilar. Je souhaite lui redonner une puissance sans précédent, artistique, politique, institutionnelle et budgétaire. A la tête de ma région, j’ai doublé les crédits destinés à la culture pour soutenir l’emploi culturel dans la production et la diffusion des créations, pour mettre en place dans chaque lycée un projet culturel, pour créer dans chaque lycée un poste d’animateur culturel, pour soutenir les festivals ; et en contrepartie des subventions régionales, j’ai demandé aux festivals et aux salles de spectacle de la Région d’offrir des places à des gens qui habituellement n’ont pas accès à la culture. J’ai aussi lancé une politique de soutien à la création plastique qui favorise l’insertion et la promotion des plasticiens en leur garantissant le droit de présentation ; un Plan Arts de la Rue, un Plan Art Roman ; j’ai consolidé le soutien au spectacle vivant et au cinéma.

Je suis très attachée au rôle des associations, dont la mission d’éducation populaire est irremplaçable. Il faut encourager et développer leur travail remarquable pour garantir l'égalité d'accès de tous les citoyens à la culture, partout où ils expriment leur soif de musique, de théâtre, de danse, de cinéma, d’opéra, de littérature, de peinture, de poésie.

Je ne crains pas de l’affirmer : c’est aussi la responsabilité du politique que de permettre à chacune et chacun de faire l’expérience du plaisir des sens, de l’émotion esthétique, de la découverte de la beauté. Et pas seulement dans les musées ou dans les « beaux quartiers » mais aussi dans les lieux où l’art a plus de peine à rentrer. Les associations ont par exemple un rôle à jouer dans l’amélioration de la vie dans les maisons de retraite, elles font un travail remarquable dans les prisons où elles introduisent de l’humanité.

La politique culturelle de demain devra garantir la pérennité de leur financement, et la régularité de celui-ci. Il n’est pas normal que les subventions publiques financent des agios bancaires tout simplement parce que les subventions ne sont pas versées en temps et heure.

Vous semblez adopter une approche pragmatique de la culture, l’alternative entre politique en direction de la création et politique en direction des publics serait-elle une fausse alternative ?

Que vaudrait une politique culturelle qui aiderait les créateurs sans penser à ceux à qui ils s’adressent, qui prétendrait s’intéresser aux publics en oubliant les artistes ? Ce serait absurde. Je n’ai pas une vision technocratique de la politique culturelle. Il y a une alchimie merveilleuse lorsque la subjectivité d’un artiste rencontre la sensibilité de son prochain. Aujourd’hui, l’enjeu n’est plus seulement l’accès illimité, mais le choix éclairé. Nous avons le devoir d’agir pour éviter que la profusion n’efface les frontières entre l’art et le divertissement, entre les produits marchands et les biens culturels. Pour empêcher que les besoins artificiels se substituent aux valeurs essentielles, que les citoyens se perdent dans un monde virtuel sans repères ni critères.

Permettez-moi d’évoquer la dimension internationale et européenne de la politique culturelle que je souhaite. Cette «Europe par la preuve » que je veux bâtir, ce sera aussi, l’Europe de la culture et de l’audiovisuel. Je défendrai la règle de l’unanimité pour garantir l'exception et la diversité culturelles, contrairement à la droite qui est favorable à la règle de la majorité qui signifierait la mort de l’exception culturelle. J’encouragerai la coopération avec les pays du sud et notamment méditerranéens pour soutenir toutes les formes de création. Le cinéma africain a des liens étroits avec le nôtre : nous devons les approfondir : quel meilleur exemple que le film franco-malien d'Abderrahmane Sissako, Bamako !

La culture c’est aussi un enjeu européen, c’est même le cœur battant de cette grande aventure. Comme l’écrivait Fernand Braudel : « la culture est la langue commune de l’Europe ».

Je veux porter cette ambition !
par Thomas publié dans : Ségolène
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12 mars
par Thomas publié dans : Ségolène
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9 mars

Partie 1 

Partie 2 (avec la Netscouade !!!)

par Thomas publié dans : Ségolène
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